Fiche n° 05 QUI EST SAUVÉ ? LA PORTÉE DE LA RÉDEMPTION

Rédemption expiation limité

 

 

 

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“ Les bases théologiques qui définissent notre identité et qui nous rassemblent ”
(cf. Synode National de Vauvert – 1996 – décision XV)

QUI EST SAUVÉ ?
LA PORTÉE DE LA RÉDEMPTION

L’œuvre de la croix a des implications sur l’ensemble de la création ; dans ce sens, elle est universelle.
Mais elle trouve sa pleine réalisation dans le salut des pécheurs ; dans ce sens, elle est particulière.
De plus, elle s’applique à la vie présente, mais ne sera pleinement réalisée que quand le Christ reviendra.

 

 

La portée de la rédemption a toujours suscité au sein de l’Eglise un réel intérêt.

Pour les uns, la portée de l’œuvre accomplie par Jésus-Christ à la croix ne saurait connaître la moindre limite en incluant, qu’ils aient la foi ou pas, tous les hommes. On parlera alors d’“ niversalisme ”.

Pour d’autres, l’œuvre de la rédemption doit forcément être limitée au salut des croyants :
-     soit du fait de la libre décision de l’homme : celui-ci n’étant pas contraint d’accepter pour son compte le salut offert par Dieu, il peut s’opposer à la grâce, et donc s’en trouver exclu ;
-     soit par le choix souverain de Dieu.

Ces deux approches ne rendent pas suffisamment compte de l’ensemble de la révélation biblique, qui pose tout à la fois le principe d’une réconciliation universelle – la victoire du Christ est totale et concerne toute la création –, et d’une rédemption particulière – Christ n’est mort, en un certain sens, que pour les élus, qu’il sauve efficacement, conformément à la volonté du Père.

1. L’œuvre de salut de Dieu en Christ concerne toute la création

Selon le Nouveau Testament, le salut accompli par Jésus-Christ ne concerne pas seulement les croyants, mais bien, en un certain sens, la création toute entière (Matt 28.18 ; Eph 1.9-10,     22-23 ; Phil 2.10-11 ; 1 Tim 2.4-6 ; 4.10).

“ Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude et de tout réconcilier avec lui-même, aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix. ” (Col 1.19-20)

L’œuvre de la Croix a une double portée : les élus et l’ensemble de la création
“ Dans un sens Christ est mort pour tous, et dans un autre sens, il est mort pour les seuls élus. ” (Charles Hodge)

La portée de la mort substitutive du Christ est particulière et définie : l’œuvre de la croix, dans le sens du pardon des péchés et du don de la vie éternelle, ne bénéficie, selon l’intention secrète de Dieu, qu’aux seuls élus. Cependant, celle-ci a aussi une portée sur l’ensemble de la création, dans le sens d’une réconciliation universelle : le dessein de salut de Dieu consiste à “ réunir sous un seul chef, le Christ, tout ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre. ” (Eph 1.10)
Paul, en 1 Timothée 4.10, présente ce double aspect en une seule formule :
“ Dieu est le Sauveur de tous les hommes ” – voilà pour l’universalité du salut ! –  “ particulièrement des croyants ” – voilà pour sa particularité ! En d’autres termes, la réconciliation n’implique pas nécessairement le salut éternel. “ Dieu est le sauveur de tous les hommes parce qu’il leur accorde à tous cette vie et ses biens (cf. Act 14.17), et sauveur des croyants à titre principal par le don de la vie éternelle. ” (H. Blocher)

L’amour de Dieu envers tous
Il y a, enracinées à la croix, différentes manifestations de l’amour de Dieu envers tous les hommes, en vertu de quoi Dieu aime particulièrement les élus, à cause de son alliance et de son élection.
    Sa bienveillance se manifeste envers tous les hommes (Matt 5.45 ; Rom 2.4).
    Sa compassion se manifeste envers l’humanité souffrante, en vertu de sa miséricorde (Ps 72.12-14).
    Sa grâce est accordée aux élus, mis au bénéfice de son pardon (Eph 1.3ss ; Luc 1.77 ; Act 26.18).

“ Car Dieu a tant aimé le monde (universalité !) qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque (particularité !) croit en lui ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle. ” (Jean 3.16)

La patience de Dieu envers tous
La portée universelle de la rédemption se manifeste en particulier à travers les bienfaits généraux de la croix (grâce commune). Dieu retient son jugement sur les pécheurs impénitents, et préserve l’humanité en restreignant les effets intensifs du péché et en permettant le développement de la culture et de la civilisation : “ Car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons ” (Matt 5.45).

Cette préservation générale, fruit de la patience de Dieu, a aussi en vue le salut des élus : “ Le Seigneur ne retarde pas l’accomplissement de sa promesse … Il use de patience envers vous, il ne veut pas qu’aucun périsse, mais que tous arrivent à la repentance. ” (2 Pi 3.9, 15 ; voir aussi : Rom 3.25 et 9.22) ;

Ainsi, il n’est pas de parcelle de la création et de la civilisation qui ne soit directement mise au bénéfice de la rédemption.

2. Le salut et l’élection

La théologie réformée distingue aussi dans l’Alliance entre Dieu et les hommes, l’alliance dite de création, ou alliance adamique, conclue avec Adam et, à travers lui, avec l’humanité tout entière – il en sera de même avec l’alliance avec Noé (Gen 9) –, et l’alliance de rédemption, conclue entre le Père et le Fils. Dans cette alliance, Dieu sauve efficacement tous ceux qu’il a décrétés de donner à son Fils en héritage, c’est-à-dire tous ceux pour lesquels Christ est mort (Jean 17.6 ; Rom 8.29).
Si l’alliance de création a été conclue avec tout le genre humain, et est, à ce titre, universelle (grâce commune), l’alliance de grâce – expression historique de l’alliance de rédemption – n’a quant à elle été conclue qu’en faveur des élus, et ce, en vertu de la pure grâce de Dieu et de son bon plaisir, et sans aucune considération de leurs œuvres (Rom 9).
“ De cette corruption et de cette condamnation générales où tous les hommes sont plongés, nous croyons que Dieu retire ceux que, dans sa volonté éternelle et immuable, Il a élus par sa seule bonté et miséricorde en notre Seigneur Jésus-Christ (Ex 33.19 ; Rom 8.29 ; 9.15), et cela sans considération de leurs œuvres (1 Sam 12.22 ; Jean 15.16 ; Rom 2.11, 23 ; 11.5-6 ; Eph 1.4-6 ; 2.8-10 ; etc.). Nous croyons qu’Il laisse les autres dans cette même corruption et condamnation, pour démontrer en eux sa justice (Ps 5.5-7 ; Ezék 9.10 ; 18.4 ; Rom 1.18 ; Gal 6.7-8), tout comme il fait briller, dans les premiers, les richesses de sa miséricorde (Ex 9.16 ; Rom 9.18, 22-23). Car ceux-ci ne sont pas meilleurs que les autres, jusqu’à ce que Dieu les distingue selon le dessein immuable qu’Il a arrêté en Jésus-Christ avant la création du monde ... ” (Confession de la Rochelle, art. 12).

Il s’ensuit donc qu’il y a un amour particulier de Dieu pour les élus, distinct de l’amour qu’il porte pour la création en général. L’amour paternel de Dieu pour ses enfants est particulier : c’est un amour électif qui s’exprime par le pardon accordé aux seuls élus qui ont reçu l’Evangile dans leur vie. Dieu aime comme un père ceux qu’il a unis à son Fils (Jean 17.23 ; Rom 8.15-16).

3. L’élection et la foi

“ Tous les hommes sont-ils donc sauvés en Christ comme ils étaient tous perdus en Adam ? Non ! Mais ceux-là seulement qui lui sont incorporés par une vraie foi et s’approprient tous ses bienfaits. ” (Catéchisme de Heidelberg, Question 20).

La Bible, à côté de la grâce universelle de Dieu, pose le principe de la responsabilité morale de l’homme dans le cadre de l'alliance, et conjointement, le fait que le salut ne s’obtient que par la foi. L'alliance avec Dieu réclame une réciprocité réelle, un engagement personnel conscient de l’individu. Il s'agit de vivre en communion avec Dieu .

Dieu est souverain dans le salut – cela, nul ne saurait en douter, étant donné les nombreux témoignages bibliques à ce sujet (Jean 1.13 ; 5.21 ; 6.37, 44-45, 65 ; Act 2.39 ; Rom 1.6 ;     Eph 1.4-14 ; 2.8-10 ...). Cependant, et c’est là la deuxième vérité affirmée avec autant de force dans l’Ecriture, l’homme est pleinement responsable de ses choix, de sorte qu’il n’a pas “ rien à faire ” pour s’approprier le salut : il faut qu’il croie – “ sans la foi, il est impossible d’être agréable à Dieu ” (Hébr 11.6) !
Sans être la cause méritoire du salut, car elle n’est pas une œuvre, la foi n’en demeure pas moins nécessaire comme condition d’appropriation du salut, et ce, bien qu’elle soit un don de Dieu (Eph 2.8).

Au jugement dernier apparaîtra clairement la distinction entre les croyants, objets de l’élection en Christ, et ceux dont l’incrédulité justifie sa réprobation (Rom 3.4).

4. La portée du salut est à la fois présente et à venir

“ Car la création a été soumise à la vanité … avec une espérance : cette même création sera libérée de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu ” (Rm 8.20-23) ; “ Je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre ” (Apoc 21.1)

La portée de l’œuvre de la croix va bien au-delà de sa réalisation présente : elle ne sera pleinement manifestée qu’au retour du Christ. C’est le “ déjà-pas encore ” du Royaume de Dieu : le salut est “ déjà ” réalisé dans la vie de tous ceux qui croient, et cependant, il n’est “ pas encore ” manifesté dans toute sa plénitude. La création tout entière est ainsi appelée à connaître, lors de la parousie, une véritable transfiguration, dont la résurrection des corps ne constitue que l’un des aspects : “ Ce qui est vrai du destin des individus semble s’appliquer à toute la création, y compris à ses dimensions culturelles. L’œuvre de Dieu s’appuiera sur ce qu’il a créé et sur toute la “ plénitude ” que les hommes auront ajoutée à ce qu’il a fait au commencement. Les fruits de l’histoire, même pécheresse, pénétreront dans la Cité Sainte pour y devenir des outils appropriés au service de Dieu et de son peuple. ” (R. Mouw)

Ainsi donc, loin d’être à la traîne de la civilisation et de la culture, l’Eglise est appelée par Dieu à être à la pointe de la découverte et de la gestion de toutes les potentialités de la création, attendant et travaillant dans la perspective du monde nouveau, de la Jérusalem céleste, “ la ville sainte, la nouvelle Jérusalem, prête comme une épouse qui s’est parée pour son époux. ” (Apoc 21.2), en ce jour glorieux où tout genou fléchira “ dans les cieux, sur la terre et sous la terre ”, et où toute langue confessera que “ Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père ” (Phil 2.10-11).

Les dérives :
Les deux principales dérives eu égard à la portée du salut sont :
1.     l'universalisme d'une part, pour lequel tous les hommes sont sauvés, qu'ils aient la foi ou non, qu'ils le sachent ou non. Valorisation d’une action sociale sans appel à la conversion vu que tous sont déjà sauvés, au détriment du mandat missionnaire (Evangile social, théologie de la libération, tendance diffuse dans les Eglises historiques) ;
2.     le particularisme strict, qui réduit la portée de l'œuvre de la croix au salut des seuls croyants, en occultant son universalité. Dévalorisation du monde présent (culture, civilisation) au profit du monde à venir, vu que le salut ne concerne que les âmes ; la seigneurie de Jésus-Christ s’exerce dans le ciel et sur l’Eglise, et non sur le monde en général, qui est sous l’empire de Satan (Voir : Lindsay, Satan, prince de la planète terre).

Les enjeux :
L'enjeu éthique : si l'œuvre de la croix s'étend à toute la création, il s'ensuit donc que rien n'échappe à l'action bienfaisante de l'Evangile, lequel englobe tous les aspects de l'existence, et pas seulement la spiritualité, la piété. A la tentation d’un piétisme réducteur, la théologie réformée oppose une vision englobante, qui entend tout subordonner au règne du Christ, et tout soumettre à sa volonté : la vie religieuse, comme aussi la vie politique, l'économie, les sciences, les arts, etc.

L'enjeu missionnaire : la proclamation de l'Evangile à tout homme s'avère une nécessité impérieuse pour l'accès au salut, puisque celui-ci ne s'obtient en définitive que par la foi : “ Et comment croiront-ils s'il n'y a pas de prédicateurs... ” (Rom 10.14).

L'enjeu psychologique : le salut étant l'œuvre de Dieu (prédestination, élection), le chrétien a la garantie que rien ne saurait contrarier le dessein de Dieu (le nombre des élus, la pérennité de l'Eglise, etc.). Il peut donc sereinement s’engager comme témoin du Christ. Il ne versera ni dans l’activisme, comme si tout dépendait de lui, ni non plus dans un quiétisme démobilisateur car il sait que Dieu l’utilise efficacement au sein de sa grande œuvre de salut.

Bibliographie :
-    Michel JOHNER, “ L’universalité et la particularité du salut chrétien ”, La Revue Réformée, N° 56 1988/4).
-    Henri BLOCHER, “ Le nombre des sauvés ”, Ichthus, N° 32 (1980).
-    Richard MOUW, La culture et le monde à venir, Paris, Sator, 1988.

-    Confession de La Rochelle : Art. 12 : “ Notre élection en Jésus-Christ ” ; Art. 13 : “ Notre salut en Christ ” ; Art. 16-24 : “ L’œuvre du salut ” – art. 20 en particulier : “ La justification par la foi ”
-    Catéchisme de Heidelberg : Voir en particulier les Questions 20-22, 60-65 (la nécessité de la foi) ;
-    Canons de Dordrecht : Voir en particulier le premier point : “ La prédestination, l’élection et la réprobation ”, et le second : “ La mort de Jésus-Christ et la rédemption des hommes ”.
-    Voir de même la Confession de Westminster, en particulier les articles III : “ Le décret éternel de Dieu ”, VII : “ L’alliance de Dieu avec l’homme ”, IX à XIV : “ Le libre arbitre ”, “ La vocation efficace ”, etc., et l’article XXXIII : “ Le jugement dernier ”.

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